Lorsque certains problèmes sont déjà présents en dentition mixte ou en bas âge, il peut être nécessaire d’intervenir à ce moment afin de prévenir que la situation empire au point d’endommager la dentition, les tissus de support (os et gencive), ou affecter la croissance des mâchoires.
Voici quelques exemples de conditions pouvant bénéficier et nécessiter une intervention d’interception en bas âge :
- déséquilibre important entre la largeur des mâchoires, ce qui cause souvent une déviation de la mâchoire inférieure (asymétrie);
- dents antérieures supérieures qui mordent à l’intérieur de celles du bas. Cela peut causer de l’usure des dents et une déviation de la mâchoire
- dents antérieures qui ne se touchent pas (béance). Cela peut causer des problèmes fonctionnels de mastication ou d’élocution/phonétique);
- perte d’espace importante due suite à la perte de dents temporaires et migration des autres dents. Il peut être indiqué de récupérer l’espace perdu pour permettre l’éruption des autres dents.
- dents en malposition sévère pouvant occasionner des problèmes esthétiques ou fonctionnels. De l’usure des dents et des problèmes de gencives peuvent en résulter. Une première intervention peut être faite pour corriger uniquement cet aspect du problème;
- présence d’une habitude chronique de suçage de pouce (ou doigt) pouvant causer des déplacements dentaires et une déformation des mâchoires;
- présence d’interférences entre les dents qui causent une déviation de la mâchoire, ce qui peut mener à de l’usure des dents et une déformation de la mâchoire.
Ces types d’interventions sont souvent appelés des traitements de type « Phase 1 » ou « préliminaires » car ils doivent, la plupart du temps, être suivis d’autres corrections plus tard. Les traitements préliminaires en bas âge :
- ne sont pas une garantie que toutes les dents permanentes sortiront adéquatement et que d’autres formes de traitements plus exhaustifs ne seront pas nécessaires plus tard lorsque la dentition sera complétée;
- peuvent rendre les interventions futures plus simples, plus rapides et moins coûteuses pour les patients;
- peuvent souvent permettre à l’orthodontiste de mieux utiliser la croissance pour corriger les déséquilibres de mâchoires sans avoir recours à la chirurgie;
- peuvent diminuent les chances d’avoir à extraire des dents permanentes plus tard;
- peuvent aident à arrêter des habitudes de suçage de pouce et doigts;
- minimisent les chances que des dents permanentes ne sortent pas et restent emprisonnées (dents incluses)
- peuvent, dans certains cas, être la seule intervention orthodontique nécessaire lorsqu’un problème peut être corrigé de façon précoce (voir un exemple plus loin dans cette page).
À mesure que nous suivons le développement de la dentition de votre enfant, nous serons en mesure de vous expliquer ce qui peut éventuellement être nécessaire afin d’obtenir une dentition esthétique et fonctionnelle.
Exemples de procédures d’interception en orthodontieUne occlusion croisée antérieure peut se manifester dès l’éruption des incisives supérieures (vers 7-8 ans) qui mordent alors derrière les dents inférieures.
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Quand intervenir et pourquoi?
- Les interventions orthodontiques précoces peuvent favoriser un meilleur environnement pour le développement dentofacial d’un jeune enfant. Le moment opportun pour intervenir est cependant difficile à déterminer précisément et demeure un défi car cela nécessite qu’on anticipe les changements associés avec la croissance faciale, le développement dento-alvéolaire et les réponses individuelles des patients
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Par définition, l’interception signifie « arrêter, modifier ou interrompre l’évolution ou la progression prévue ». Une supervision précoce peut prévenir que des adaptations néfastes et les limites souvent associées à une malocclusion importante se développent pendant l’adolescence. Dans certains cas, une intervention précoce permet d’obtenir des résultats qui seraient inatteignables une fois que la croissance dento-faciale est terminée1.
- Un des objectifs des interventions précoces doit être de prévenir des changements progressifs et irréversibles des tissus mous et osseux
- Les interventions faites pendant le stage de dentition mixte peuvent préserver ou récupérer la longueur des arcades dentaires, encourageant ainsi la dentition à sortir dans une meilleure forme d’arcade et avec moins d’éruptions ectopiques (hors de la position normale). L’évidence scientifique a démontré que les dents sortant dans une mauvaise position démontrent beaucoup plus de problèmes de gencive (perte de gencive, récession, déchaussement) et de perte osseuse que les dents faisant éruption dans une position plus normale.
- Les déviations mandibulaires fonctionnelles causées par des interférences entre les dents lors de la fermeture (voir exemples et vidéo plus bas dans cette même page), sont aussi associées avec des défauts de gencive et d’os alvéolaire ainsi que que des dysfonctions des articulations temporo-mandibulaires (ATMs) qui peuvent progresser en des dégénérescences ou changements osseux si non traitées.
- Un traitement précoce peut aussi permettre d’améliorer les déséquilibres squelettiques entre les mâchoires influençant ainsi la quantité et la direction de la croissance dento-faciale.
- Des chercheurs ont émis l’hypothèse qu’une obstruction nasale chronique, comme par exemple une rhinite allergique, puisse être associée à une position adaptative plus basse de la langue et une respiration buccale. Ces changements compensatoires de la langue et du patron de respiration peuvent affecter le patron de croissance dento-faciale et contribuer au développement de malocclusions, particulièrement les occlusions croisées postérieures et les béances antérieures. Bien que ce type de problèmes puisse être corrigé à tout âge, il est plus facile de le le faire en bas âge avant que la croissance soit terminée1.
- La supervision pour prévenir et intercepter des problèmes en orthodontie devrait être faite de façon à bénéficier au maximum de la croissance dento-faciale et de l’éruption dentaire active . Vu qu’il n’existe aucune corrélation entre la croissance squelettique, le développement dentaire et l’âge chronologique, il est difficile de recommander un âge idéal précis pour une première évaluation orthodontique. Cependant, une directive générale, telle que recommandée par l’Association américaine des orthodontistes, serait de recommander une première évaluation orthodontique vers l’âge de 7 ans ou lorsque les premières dents permanentes font éruption. En cas de doute, il n’est jamais trop tôt pour demander une opinion ou une évaluation orthodontique.
Exemples de procédures d’interception orthodontique
Lorsqu’une seule dent est basculée vers l’intérieur, un simple appareil peut la corriger en quelques semaines seulement.
Lorsque plusieurs dents sont affectées, il est parfois plus facile d’utiliser des « broches » pour faire les corrections. Ceci permet de faire des mouvements dentaires plus complexes. Voici quelques exemples d’occlusions croisées interceptées et corrigées à l’aide de « broches ».
- La vidéo ci-dessus montre un jeune patient de 9 ans avec une occlusion croisée antérieure d’une seule dent (incisive supérieure droite). Ceci créé une importante interférence fonctionnelle lors de la fermeture de la mâchoire ce qui fait dévier la mandibule vers l’avant.
- À long terme, ceci peut causer une déviation ou asymétrie permanente de la mandibule, de l’usure des dents qui glissent constamment l’une sur l’autre en fermant (normalement, ces dents ne doivent pas se toucher ainsi), de la récession gingivale (déchaussement) en forçant l’incisive inférieure vers l’avant et des problèmes aux articulations temporo-mandibulaires.
- Bien que ce problème puisse avoir des conséquences importantes pour la dentition et le parodonte, une telle occlusion croisée peut être corrigée facilement en quelques semaines.
Exemple des multiples bénéfices d‘une intervention précoce
- (A) Ce jeune garçon de 9.5 ans présente une occlusion croisée postérieure droite (flèche bleue) et antérieure (les 2 incisives centrales supérieures mordent derrière celles du bas), ce qui cause un déplacement d’une incisive inférieure et un début de déchaussement de la gencive (flèche jaune).
- (B) Une première intervention à l’aide d’un appareil d’expansion maxillaire rapide permit de rétablir l’équilibre en largeur des 2 mâchoires. Un diastème important (flèche noire) se crée alors entre les centrales, signe que la suture palatine s’ouvre bien.
- (C et D) Après la phase d’expansion, des boîtiers sont utilisés sur les incisives pour améliorer leur alignement
- (E) Une fois cette étape préliminaire complétée, la dentition est gardée sous observation pendant l’éruption des autres dents permanentes postérieures
- (F) Près de 3 ans plus tard, la dentition est complétée et la malocclusion est beaucoup moins sévère grâce à l’intervention préliminaire. Notez l’amélioration de la gencive (flèche rouge).
- (G et H) Comparaison de la dentition (bouche ouverte) avant et après l’intervention.
Amélioration du niveau de gencive avec l’orthodontie
Les séparateurs orthodontiques
Une intervention d’interception peut être aussi simple que de débloquer des molaires qui ont de la difficulté à sortir.
Correction d’une occlusion croisée antérieure avec déviation mandibulaire
- Certaines malocclusions ont une composante « fonctionnelle » c’est-à-dire que la fonction, comme la fermeture de la bouche, cause un déplacement de la mandibule vers l’avant ou le côté et créé ou exacerbe une malocclusion. (Voir vidéo plus haut dans cette page.)
- Ceci est commun dans les cas de déficience maxillaire transverse où la mâchoire supérieure est trop étroite et cause une déviation mandibulaire vers la droite ou la gauche, créant une occlusion croisée postérieure. Un traitement d’expansion maxillaire rapide est alors indiqué pour corriger ce problème et la déviation qui y est associés.
- Le même phénomène peut se produire lorsque les incisives ferment dans une relation « bout-à-bout » et que la mandibule dévie alors vers l’avant afin d’éliminer l’interférence entre les incisives lors de la fermeture et procurer des contacts postérieurs permettant de mastiquer et fonctionner convenablement.
- Il est important d’intercepter ces problèmes car s’ils demeurent non traités, la mandibule qui est déplacée vers l’avant « artificiellement » à cause de l’interférence dentaire, grandira dans cette position et deviendra plus « longue » causant une malocclusion de type « Classe III » pouvant nécessiter des traitements orthodontiques beaucoup plus élaborés allant même jusqu’à la chirurgie orthognathique dans les cas les plus graves. Ce genre de problème ne peut se corriger sans intervention orthodontique.
- L’exemple suivant montre un exemple de correction précoce où un traitement préliminaire à l’âge de 9 ans fut tout ce était nécessaire pour rétablir une occlusion normale. Aucun traitement ne fut requis suite à cette intervention.
Cas CC – occlusion croisée antérieure
- (A) Ce patient de 9.7 ans mord avec une occlusion croisée antérieure; les incisives supérieures sont derrière celles du bas.
- (B) L’examen clinique révèle qu’en fait, il peut mordre en relation « bout-à-bout » mais, ceci n’étant pas une position confortable lui permettant de mastiquer convenablement, il avance sa mandibule vers l’avant pour éliminer l’interférence entre les incisives et ainsi obtenir des contacts entre les dents postérieures lui permettant de mastiquer.
- (C) La correction orthodontique était simple et consistait à utiliser des appareils multi-bagues fixes (« broches ») sur les 4 incisives supérieures (et les molaires pour retenir le fil) et, à l’aide d’un ressort exerçant une légère pression sur les dents, déplacer les incisives devant celles du bas. (C) = à la pose des appareils.
- (D) Deux mois plus tard, les corrections désirées sont obtenues et les appareils peuvent être enlevées (note : une telle correction peut prendre habituellement de 3 à 6 mois).
- (E) Une fois les appareils enlevés, il s’agit de suivre l’évolution de la dentition pendant les années à venir. Le patient fut évalué une fois par année entre l’âge de 9.9 ans (fin du traitement préliminaire) et l’âge de 12 ans, moment où l’éruption de ses dents définitives (permanentes) fut complétée.
- (F) À 12 ans, les dents permanentes sont en bouche, les corrections faites précédemment sont stables, la fonction et adéquate et le patient et ses parents sont satisfaits de l’esthétique de la dentition et du sourire. Il n’est donc pas nécessaire de faire des corrections orthodontiques additionnelles. La présence de légers espaces de chaque côté des latérales supérieures est due à la dimension étroite de ses dents et ne cause aucun problème de fonction. Si le patient le désirait, pour des raisons esthétiques, il pourrait demander à son dentiste généraliste d’élargir ces latérales à l’aide de matériau composite. Pour voir des exemples de tels élargissements de dents.
Canine incluse et résorption radiculaire
Pourquoi une évaluation précoce en orthodontie à l’aide de radiographies? Les canines incluses ne peuvent être évaluées correctement qu’avec des radiographies et il est important de le faire en bas âge pour minimiser les chances d’avoir des dommages graves et irréversibles comme de la résorption radiculaire. Pour en savoir plus.
1 – Early Orthodontic Supervision, Donald R. Joondeph, Orthodontic Dialogue, Vol 1, number 2, Summer 1989, AAO publication
➡ Dernière mise-à-jour : 2017-10-27 @ 20:05:40 Jules E. Lemay, www.ortholemay.com – Tous droits réservés / All rights reserved
Publié le : May 27, 2009 @ 01:00 |