À quoi sert la compensation dento-alvéolaire
- Lorsqu’il existe un déséquilibre important entre les mâchoires, l’ « approche idéale » devrait viser à corriger cette irrégularité en harmonisant la longueur des mâchoires (ou une irrégularité dans une autre dimension).
- S’il n’y a plus de croissance, cette correction peut nécessiter une chirurgie orthognathique. Si les mâchoires ne peuvent être équilibrées, un compromis doit alors être accepté pour améliorer la position des dents sur les mâchoires « inégales ».
- Selon la sévérité du décalage entre les mâchoires, des mouvements dentaires peuvent parfois permettre d’obtenir une relation acceptable entre les dents des deux arcade (esthétique et fonction) ou il peut être nécessaire de garder un certain écart entre les dents si le décalage est trop important (voir illustrations).
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Équilibre squelettique et dentaire normalDans les illustrations de cette section, les mâchoires sont représentées par des rectangles bleus, les dents (incisives) par les lignes noires et la ligne pointillée rouge représente le plan où les mâchoires et le dents doivent être placées pour avoir une relation la plus équilibrée ou harmonieuse possible au point de vue esthétique et fonctionnel. Le but des traitements d’orthodontie est, dans la mesure du possible et selon les moyens disponibles, de tenter d’atteindre cet « équilibre » ou de s’en approcher le plus possible. Cependant, en présence de déséquilibres squelettiques (décalages entre les mâchoires), ou de l’impossibilité d’avoir recours à certaines procédures (extractions, chirurgie, utilisation de certains appareils, etc.) cet objectif « idéal » ne peut être atteint et un « compromis » doit être envisagé. Une façon de faire de tels compromis est de faire des « compensations » dento-alvéolaires qui visent à « tricher » en déplaçant les dents sur les mâchoires déséquilibrées. Cette section vise à illustrer plusieurs situations où de telles compensations peuvent être utilisées . Lorsque les mâchoires sont bien placées antéro-postérieurement (avant-arrière) la mandibule et le maxillaire supérieur sont alignées sur le plan vertical (pointillé rouge). Les incisives supérieures et inférieures ont une inclinaison leur permettant d’être légèrement devant ce plan tout en gardant les incisives supérieures devant celles du bas. Voici quelques situations communes illustrées à l’aide de diagrammes et la façon dont elles peuvent être traitées en orthodontie en utilisant parfois des « compensations » ou camouflage.
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Mâchoires équilibrées, décalage dentaire
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Classe 2 – Rétrognathie mandibulaire; la croissance fait toute la différence!
- (A) En présence d’une mandibule reculée (rétrognathie mandibulaire) un décalage existe entre les mâchoires, ce qui créé aussi un écart entre les dents. La mandibule courte et reculée (rétrognathie) par rapport au maxillaire supérieur explique le décalage entre les incisives (overjet). Parfois, les dents supérieures antérieures peuvent aussi être avancées ou inclinées vers l’avant ce qui augmente l’écart entre les dents des deux arcades. Ceci est typique des « Classes 2 division 1 » qui sont l’une des malocclusions le plus communes.
- (B) La présence ce croissance mandibulaire facilite grandement la correction d’une telle malocclusion d’où l’importance d’une intervention au moment le plus opportun soit avant le pic de croissance. En l’absence de croissance, d’autres alternatives devront être envisagées (voir les exemples suivants).
- (C) Le résultat final est l’obtention d’une relation normale entre les dents et les mâchoires sans à avoir eu recours à des compensations dentaires (telles que décrites dans d’autres exemples de cette page), des extractions et des chirurgies. Ceci constitue la façon la plus simple de corriger des « classes 2 » ou rétrognathies mandibulaires… mais il faut l’aide de la croissance.
Classe 2 – Rétrognathie mandibulaire; compensations dentaires ± génioplastie
- (A) Rétrognathie mandibulaire, décalage entre les mâchoires causant un écart important entre les dents antérieures.
- (B) Compensation; S’il n’y a pas de croissance suffisante pour combler le déséquilibre entre les mâchoires, le incisives inférieures peuvent être penchées vers l’avant pour compenser et réduire l’écart (compensation dentaire ou dento-alvéolaire).
- (C) Rétrognathie mandibulaire sévère; Si l’écart entre les mâchoires est trop important (mandibule très courte), même une compensation ne pourra réduire l’écart complètement entre les dents antérieures. En l’absence de croissance ou de chirurgie une “compensation dentaire” peut “camoufler” partiellement le déséquilibre squelettique mais les dents ne peuvent être déplacées suffisamment pour éliminer complètement l’écart qui les sépare. Un écart devra alors être maintenu entre les incisives (overjet). Dans une telle situation, la mandibule demeure reculée et ces personnes présentent souvent un menton fuyant malgré l’alignement acceptable des dents. Si cette condition est considérée inesthétique par le patient, une génioplastie d’avancement peut être considérée (voir exemple et explications ci-dessous).
- Une autre solution serait d’avoir recours à une chirurgie orthognathique (voir exemple plus loin).
Génioplastie d’avancement pour allonger un menton fuyant dans un cas de rétrognathie mandibulaire
(A et B) sont les mêmes illustrations que l’exemple précédent ou la présence d’une mandibule courte est compensée par le déplacement vers l’avant des incisives inférieures. Ceci permet d’obtenir une relation adéquate entre les dents mais le profil peut présenter un menton fuyant qui peut être corrigé par une génioplastie qui est une intervention chirurgicale permettant d’avancer le menton sans affecter la dentition (génioplastie d’avancement). Dans les cas de classe 3, l’inverse peut être fait pour reculer un menton trop proéminent (génioplastie de recul)
- (A) Rétrognathie mandibulaire, décalage entre les mâchoires causant un écart important entre les dents antérieures.
- (B) Compensation; S’il n’y a pas de croissance suffisante pour combler le déséquilibre entre les mâchoires, le incisives inférieures peuvent être penchées vers l’avant pour compenser et réduire l’écart (compensation dentaire ou dento-alvéolaire). Une section du menton sous les dents peut alors être avancée chirurgicalement pour améliorer l’esthétique du profil sans affecter les dents (génioplastie d’avancement).
- (C) Après la génioplastie, le menton avancé est maintenant en « équilibre » avec le reste du visage et rend le profil plus harmonieux. La relation des dents n’est pas affectée. Cette intervention (génioplastie d’avancement) est beaucoup plus simple qu’un avancement mandibulaire qui permet d’avancer la mandibule ET la dentition (voir exemple ci-dessous).
- Pour en savoir plus sur les génioplasties.
Classe 2- Rétrognathie mandibulaire – Chirurgie
- (A) Mandibule courte pour laquelle des compensations dento-alvéolaires sont déjà présentes dans une tentative de la nature de réduire l’écart entre les dents en basculant les incisives inférieures vers l’avant. Il n’est pas possible de basculer davantage ces dents en orthodontie. À cause de la sévérité du décalage squelettique une chirurgie doit être envisagée pour avancer la mandibule si on désire réduire davantage l’écart entre les 2 mâchoires et les dents.
- (B) En préparation pour la chirurgie, une dent est extraite de chaque côté de la mandibule pour reculer les incisives et ainsi éliminer les compensations naturelles qui étaient présentes. Ceci permet de mieux placer les dents sur la mandibule et de permettre un plus grand avancement mandibulaire chirurgical.
- (C) Le résultat final est des mâchoires et une dentition équilibrées et plus fonctionnelles.
Classe 2 – Rétrognathie mandibulaire – Extractions
- (A) Mandibule courte (rétrognathie) et écart entre les dents antérieures
- (B) Extractions supérieures; en l’absence de croissance ou chirurgie orthognathique, une dent peut être extraite de chaque côté de l’arcade supérieures pour permettre de reculer les dents antérieures.
- (C) Le résultat final est une bonne relation fonctionnelle entre les dents mais les dents supérieures ont été reculées au-delà de leur position idéale. Ceci constitue un compromis qui peut être acceptable dans plusieurs cas. De plus, il est parfois aussi possible de compenser pour la position reculée des incisives inférieures en les basculant davantage vers l’avant.
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Classe 2 – Excès maxillaire – Extractions
- (A) Dans cet exemple, le maxillaire supérieur est plus long ou avancé, ce qui explique l’écart entre les dents antérieures.
- (B) Extraction; une option de traitement consiste à extraire une dent de chaque côté à l’arcade supérieure pour permettre d’utiliser l’espace ainsi créé afin de reculer les dents antérieures supérieures pour rejoindre les dents inférieures.
- (C) Le résultat final est une dentition et des mâchoires équilibrées.
Classe 2 division 2 et rétrognathie mandibulaire; camouflage
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- Une fois cette correction initiale effectuée (fig. B), différentes options peuvent être envisagées pour réduire l’écart horizontal entre les dents antérieures. Si le patient est en croissance, on peut espérer un déplacement favorable de la mandibule vers l’avant qui contribuera à faire aussi avancer les dents inférieures et réduire l’écart. Cette nouvelle occlusion peut maintenant ête approchée comme une clase 2 décrite précédemment.
- S’il ne reste plus assez de croissance favorable, chez les adultes par exemple, les options seront les alternatives décrites précédemment pour les classes 2 soit d’envisager une chirurgie pour avancer la mandibule, extraire des dents à l’arcade supérieure pour reculer les dents antérieures ou garder l’écart horizontal (overjet) tel qu’il est (compromis ou camouflage). Voir les illustrations ci-haut pour des exemples.
- (A) Classe 2 div. 2 avec rétrognathie mandibulaire (la position du maxillaire supérieur est normale). Les incisives supérieures sont basculées vers l’intérieur et recouvrent celles du bas.
- (B) Après l’alignement initial, les incisives supérieures ont inclinées normalement mais l’écart entre les incisives supérieures et inférieures est augmenté significativement. À ce stage du traitement, les options décrites ci-haut peuvent être envisagées.
- ➡ Pour voir un exemple d’un tel camouflage ou traitement de compromis dans un cas de classe 2 division 2
- :arrow:Pour voir des exemples de classes 2 div. 2 corrigées en orthodontie.
Classe 3 – Prognathie mandibulaire
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Classe 3 – Déficience maxillaire
- (A) Une « classe 3 » peut aussi être causée par une déficience ou un recul du maxillaire supérieur, ce qui créé un décalage entre les incisives.
- (B) Compensation; si le décalage n’est pas trop important entre les mâchoires, il peut être possible de « compenser » en basculant les incisives supérieures vers l’avant et en « reculant » celles du bas ou en les basculant vers l’intérieur.
- (C) Cependant, si le décalage est trop important entre les mâchoires, une telle compensation est impossible et seule une chirurgie orthognathique pourrait rétablir l’équilibre entre les mâchoires décalées. Une telle situation peut être causée par un recul de la mâchoire supérieure et une mandibule trop avancée (prognathie mandibulaire). La combinaison de ces deux déséquilibres accentue le décalage et rend impossible une compensation dento-alvéolaire adéquate.
Classe 3 – Légère prognathie mandibulaire et maxillaire normal
- (A) Ceci représente une autre variation possible d’une malocclusion classe 3 où le maxillaire supérieur serait normal et la mandibule légèrement forte ou prognathe avec des dents qui ne sont pas placées de façon à compenser pour ce déséquilibre squelettique. Ceci permet alors d’envisager basculer les incisives inférieures vers l’intérieur pour rejoindre celles du haut, ce qui ne pourrait être fait si les incisives inférieures étaient déjà inclinées vers l’arrière (comme dans le cas de la correction chirurgicale ci-dessous).
- (B) Une solution possible serait d’extraire à l’arcade inférieure (par exemple une prémolaire de chaque côté) et de reculer les incisives jusqu’à obtenir un surplomb et une fonction adéquate avec les incisives supérieures.
- (C) Le résultat serait alors une mandibule qui est encore légèrement prognathe ais qui permet d’avoir une relation adéquate entre les incisives. Ceci n’est possible que si la prognathie mandibulaire n’est pas sévère sinon, une chirurgie doit être envisagée.
Classe 3; Correction chirurgicale d’une prognathie mandibulaire et déficience maxillaire
- (A) Une classe 3 squelettique peut aussi être causée par une combinaison de déficience maxillaire (maxillaire supérieur trop reculé) et par une prognathie mandibulaire (mandibule forte ou longue) . Des compensations dentaires sont aussi souvent présentes tel que décrit dans pour le cas précédent.
- Si ce décalage des mâchoires est trop important pour envisager « tricher » davantage avec des mouvements dentaires compensatoires (camouflage), il faut envisager une chirurgie orthognathique pour équilibrer les mâchoires.
- (B)Décompensation dentaire; les compensations doivent être éliminées avant la phase chirurgicale afin de permettre un positionnement optimale des mâchoires lors de la chirurgie. Ainsi, les incisives supérieures qui étaient trop avancée seront reculées et l’opposé est fait pour les incisives inférieures.
- (C) Chirurgie orthognathique; une fois les dents bien placées et alignées sur chaque mâchoire, la chirurgie rétablira la relation antéro-postérieure entre les mâchoires en avançant le maxillaire supérieur et en reculant la mandibule.
- (D) Le résultat final tente de s’approcher le plus possible d’un équilibre « normal » tant pour les mâchoires que pour les incisives.
Classe 1 – Équilibre squelettique normal
- (A) Dans l’exemple ci-haut, les mâchoires sont bien proportionnées et bien placées l’une par rapport à l’autre mais il existe un écart important entre les antérieures supérieures et inférieures (overjet) à cause de leur inclinaison respective. Ce genre de malocclusion est fréquent chez les suceurs de pouce ou doigts. L’action du pouce pousse les incisives supérieures vers l’avant et parfois les incisives inférieures vers la langue augmentant ainsi l’écart entre les dents.
- (B) Les corrections orthodontiques viseront à maintenir l’équilibre squelettique adéquat tout en corrigeant la position des dents en changeant, entre autre, leur inclinaison. Des compensations dentaires ne sont pas nécessaires, il s’agit plutôt de donner la position et l’inclinaison « normales » aux dents.
Classe 1 – Protrusion bimaxillaire
Il est possible que les deux mâchoires soient dans une bonne relation antéro-postérieure (avant-arrière) mais que leur position trop avancée ne donne pas un profil harmonieux en créant une protrusion excessive des lèvres. Dans un tel cas, le traitement visera à reculer les dents antérieures pour diminuer potrusion des lèvres et des extractions sont fréquemment indiquées pour obtenir l’espace nécessaire à ce recul.
- (A) Les dents antérieures « débordent » vers l’avant et sont très inclinées. Elles sont aussi placées sur des mâchoires « longues » ou protrusives. Des extractions de prémolaires seront faites (*) pour permettre de reculer les antérieures.
- (B) Le recul des dents et la diminution de leur inclinaison permet aussi de diminuer la protrusion des lèvres et de rendre le profil plus harmonieux.
Faisabilité des compensations
La faisabilité de traitements par compensation dento-alvéolaire dépend de plusieurs facteurs dont;
- La sévérité du décalage entre les mâchoires; il y a une limite à la possibilité d’incliner les dents. Dans les cas les plus sévères, malgré la volonté de « compenser » dentairement pour un décalage important, la chirurgie peut être essentielle sinon il peut être nécessaire de garder un certain écart entre les dents même si elles auront été inclinées partiellement (voir exemple ci-haut).
- La qualité de la gencive et du parodonte; il faut des tissus de qualité supportant et entourant les dents pour effectuer de tels mouvements dentaires sans causer de récession gingivale et/ou perte osseuse.
- Une bonne coopération de la part du patient concernant le port des élastiques, l’hygiène buccale et suivre les autres directives essentielles au le succès du traitement.
- Les exemples illustrés dans cette section ne représentent que quelques situations rencontrées occasionnellement. Cette liste est loin d’être complète et il existe beaucoup plus de conditions qui pourraient être ajoutées à cette section.
Certaines corrections faites à l’aide de compensations dento-alvéolaires présentent une stabilité plus précaire à la fin du traitement alors un bon protocole de rétention est essentiel.
Et la nature dans tout cela?
Compenser… c’est tricher! L’orthodontie permet une forme de « tricherie » pour aligner des dents sur des mâchoires équilibrées lorsque que c’est possible de le faire ou lorsque d’autres alternatives ne sont pas envisageables (chirurgie).
Il faut cependant savoir que cette approche tente en fait d’imiter la nature qui fait elle-même certaines compensations lorsque les mâchoires ne croissent pas en harmonie.
Les « classes 2 » et « classes 3 » squelettiques présentent, la plupart du temps, certaines compensations dento-alvéolaires pour tenter de camoufler l’écart entre les mâchoires et améliorer la fonction masticatoire et de la dentition.
Ainsi, des mandibules reculées (rétrognathie mandibulaire, classe 2) auront des incisives inférieures très penchées vers l’avant tandis que des mandibules « fortes » ou longues (prognathie mandibulaire, classe 3) présenteront des incisives inférieures naturellement inclinées vers l’intérieur et des incisives supérieures inclinées vers l’avant dans une tentative de rejoindre celles du bas.
Il y a cependant des limites!
Bien que la nature tente ainsi de compenser pour le déséquilibre des mâchoires, il y a une limite à ce qu’elle peut faire elle aussi. Ainsi, malgré une « tentative de compensation » naturelle à l’aide de dents inclinées, il peut demeurer un écart ± important entre les dents antérieures pour les déséquilibres squelettiques les plus importants. Si l’orthodontie ne peut procurer une compensation additionnelle pour réduire cet écart, une chirurgie orthognathique sera la seule autre alternative pour équilibrer le tout.
➡ Dernière mise-à-jour : 2017-04-17 à 10:55:29 © Jules E. Lemay, www.ortholemay.com – Tous droits réservés / All rights reserved Publié le : Jul 4, 2012 @ 22:17 |