La mésiodens; un cas particulier
Incidence
- Une mésiodens est une dent supplémentaire ou surnuméraire localisée entre les deux incisives centrales maxillaires. La littérature rapporte un taux d’incidence pour les dents surnuméraires variant entre 0,15% et 3,9% (0,15 à 1.9% pour les mésiodens).
- Elles sont habituellement seules mais peuvent apparaître en groupe et peuvent être unilatérale ou affecter les deux côtés de l’arcade dentaire et restent souvent incluses sans faire éruption.1
- Les dents surnuméraires peuvent affecter la dentition primaire et la dentition permanente mais sont 5 fois plus fréquentes en dentition adulte et 80 à 90% des dents surnuméraires affectent l’arcade supérieure.
- 33% des patients ayant une mésiodens présentent aussi une autre dent surnuméraire.
Étiologie
- Il existe plusieurs théories pour expliquer la présence d’une mésiodens mais celle la plus acceptée est l’hyperactivité de la lamina dentaire, tissus à l’origine des dents, qui aurait des ramifications dans le palais qui se développent en une dent supplémentaire.5
- La génétique a aussi un rôle à jouer car on observe des mésiodens chez des jumeaux des frères et sœurs et dans plusieurs générations d’une même famille. Les hommes sont 2 fois plus affectés que les femmes.
- Lorsqu’il y a présence d’une dent primaire surnuméraire, il y a souvent une dent permanente supplémentaire aussi (visible sur une radiographie).
Séquelles
- La présence d’une telle dent peut causer certains problèmes comme :
- créer un espace ou diastème entre les centrales,
- entraîner une éruption tardive des incisives permanentes ou empêcher leur éruption (dans 26 à 52% des cas),1
- entraîner une éruption ectopique (en position anormale), un déplacement ou une rotation des incisives permanentes (dans 28 à 63% des cas),1
- peut altérer l’occlusion et l’apparence (esthétique),
- une perte d’espace et une déviation des lignes médianes,
- la dilacération (déformation) ou la résorption et perte de vitalité des racines des dents adjacentes en développement,
- une éruption ectopique, par exemple dans le palais,
- l’apparition de kystes dentigères (dans 4-9% des cas).1
Diagnostic
- En présence d’une éruption asymétrique des incisives supérieures, d’une rétention prolongée des incisives temporaires (surtout asymétrique) ou d’une éruption ectopique significative de l’une ou des deux incisives permanentes , il faut suspecter la présence d’une dent surnuméraire ou d’une mésiodens et un examen radiologique s’impose.
- Un diagnostic précoce est important pour permettre au clinicien d’administrer un traitement à la fois optimal et minimal et minimiser les impacts de la présence d’une telle dent. La prise de radiographies et idéalement d’une tomodensitométrie volumique à faisceau conique (TVFC) permet d’identifier et localiser en 3D la présence d’une mésiodens (voir exemple plus loin).
Traitement
Seulement 25 % des mésiodens feront éruption spontanément dans la cavité buccale. Le traitement d’une mésiodens dépendra de plusieurs facteur et peut comprendre les options suivantes :
- Extraction : dans 75% des cas l’incisive fera éruption spontanément une fois une mésiodens extraite. L’extraction au moment opportun augmentera les chances que se produise une éruption normales des incisives.
- L’extraction d’une mésiodens pendant le stage de dentition primaire est peu recommandé car les dents primaires surnuméraires font souvent éruption dans la bouche et l’extraction chirurgicale de dents incluses peut augmenter le risque de déplacement ou de dommages aux incisives permanentes.2, 3
- L’extraction en début de dentition mixte favorisera cependant une éruption normale des incisives centrales avec les forces éruptives normales. Le moment recommandé pour extraire une mésiodens est ver l’âge de ± 10 ans, période à laquelle l’apex de l’incisive centrale non éruptée est presque mature ou fermé.4
- Plus l’extraction sera reportée, plus grands seront les risques que cela affecte l’éruption des dents permanentes.
- L’extraction de mésiodens peut être fait sous anesthésie locale.
- Après l’extraction, un suivi radiologique aux 6-8 mois est indiqué afin d’évaluer l’éruption des dents.
- Observation : si le dentiste ou chirurgien maxillo-facial considère qu’il est trop risqué d’extraire la mésiodens à cause de sa malposition extrême car l’intervention chirurgicale risquerait d’endommager les autres dents ou de les dévitaliser, l’extraction peut être reportée. Si la mésiodens est vraiment mal positionnée et n’affecte pas les racines des autres incisives, dans de rares cas, elle pourrait demeurer en place. Un suivi radiologique serait alors indiqué pour déceler l’apparition de tout problème.
- Traitement orthodontique : une fois la mésiodens extraite, si les incisives ne font pas éruption spontanément ou qu’il n’y a pas de signe d’éruption dans les 6-12 mois suivant l’extraction, il peut être nécessaire de créer de l’espace dans l’arcade pour accommoder les incisives (s’il y a eu perte d’espace) ou de faire une exposition chirurgicale des incisives non éruptées afin de leur appliquer une traction orthodontique pour les descendre et les loger dans l’arcade dentaire.
Cas CP – Dent surnuméraire incluse (mésiodens)
La vidéo suivante montre la progression d’une dent surnuméraire localisée dans le centre de l’arcade supérieure entre les incisives centrales à l’aide de deux radiographies panoramiques prises à deux années d’intervalle. La seconde radiographie fut prise lorsque la patiente avait 10.5 ans. On peut remarquer que la position de la dent surnuméraire semble avoir changé pendant les deux années mais il est difficile de déterminer exactement sa position, sa forme et sa direction d’éruption.
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Cas AC – Incisives centrales incluses et mésiodens
Ce jeune garçon de 10 ans avait 2 dents surnuméraires (mésiodens), similaires à ce qui est décrit précédemment, qui bloquaient l’éruption des incisives centrales supérieures. Ces dents sortent normalement vers 7-8 ans. Les dents surnuméraires furent extraites mais les incisives ne faisaient pas éruption. La radiographie panoramique montraient que les dents étaient bel et bien présentes mais très hautes et dans une position anormale. Une TVFC 3D permit de bien identifier la position des dents et de confirmer que les racines des centrales, bien que pas complètement visibles sur la panoramique, étaient normales. Ceci permettait donc de justifier les « efforts » nécessaires pour tenter de loger ces dents incluses dans l’arcade dentaire à l’aide d’un traitement orthodontique.
Cette vidéo montre la tomodensitométrie volumique à faisceau conique (TVFC) de ce patient à partir de laquelle les images ci-dessus ont été extraites.
➡ Information supplémentaire; pour en savoir plus sur :
- la gestion de l’espace permettant de minimiser les problèmes d’éruption,
- d’autres problèmes d’occlusion et d’éruption et problèmes d’éruption dentaire,
- l’espace disponible et l’éruption dentaire,
- Pour voir d’autres exemples démontrant l’importance de la prise de radiographies pour le diagnostic et la détection de problèmes « invisibles à l’œil nu ».
- ➡ Pour en savoir plus sur les dents surnuméraires et la mésiodens, une dent surnuméraire dans la région antérieure supérieure.
Références :
1-Russel et Folwarczna, La mésiodens – Diagnostic et traitement d’une dent surnuméraire courante, J Can Dent Assoc 2003; 69(6):362–6
2-Humerfelt D, Hurlen B, Humerfelt S. Hyperdontia in children below four years of age: a radiographic study. ASDC J Dent Child 1985; 52(2):121–4.
3- Solares R. The complications of late diagnosis of anterior supernumerary teeth: case report. ASDC J Dent Child 1990; 57(3):209–11.
4- Henry RJ, Post AC. A labially positioned mesiodens: case report. Pediatr Dent 1989; 11(1):59–63
➡ Dernière mise-à-jour : 2018-07-20 à 11:51:12 © Jules E. Lemay, www.ortholemay.com – Tous droits réservés / All rights reserved Publié le : May 20, 2016 @ 15:13 |