Comment se ferment les espaces interdentaires antérieurs
La fermeture d’espaces interdentaires peut se faire principalement de trois façons selon l’endroit où ils sont situés dans l’arcade dentaire;
Pour les espaces postérieurs :
- en reculant les dents situées devant l’espace vers l’arrière,
- en avançant les dents derrière l’espace vers l’avant,
- une combinaison de ces deux mouvements soit avancer les dents postérieures et reculer celles du devant.
La plupart du temps, une combinaison de ces deux mouvements se produira. Il est mécaniquement plus difficile d’obtenir le déplacement d’un seul segment de l’arcade ou de groupe de dents (antérieur ou postérieur) sans qu’il y ait mouvement des autres dents. Si un tel mouvement est désiré, il est habituellement nécessaire d’avoir recours à une technique d’ancrage spéciale comme l’utilisation de mini-vis d’ancrage.
Pour les espaces antérieurs :
- en rapprochant les dents espacées vers le centre de l’arcade (vers la ligne médiane),
- en reculant les dents trop avancées et espacées,
- une combinaison de ces deux mouvements.
Cette section traitera principalement de la fermeture des espaces antérieurs car il est important de comprendre comment deux des trois dimensions (verticale et horizontale) s’influencent mutuellement et directement lorsqu’on tente de fermer les espaces interdentaires situés entre les six dents antérieures.
Le fait de reculer des incisives les rapprochera automatiquement et cela diminuera le surplomb antérieur horizontal (overjet). Par contre, le fait de déplacer les incisives vers le centre ne nécessite pas obligatoirement de les reculer. Dans la plupart des cas cependant, une combinaison de ces deux mouvements se produit (déplacement vers le centre et recul).
Le recul des dents antérieures nécessite aussi que le surplomb antérieur vertical (overbite) permette le recul des dents car, si les dents se surplombent trop, il sera impossible de les reculer sans qu’il y ait « collision » ou obstruction entre les incisives supérieures et inférieures. Les incisives supérieures seront bloquées dans leur mouvement vers l’arrière par le contact avec les incisives inférieures. Cette situation est commune dans les cas de malocclusion de type classe II.
À l’opposé, dans des situations où il n’y a pas de surplomb vertical excessif, comme dans les cas de béance antérieure, il n’y aura pas d’empêchement physique au recul des incisives supérieures par les dents inférieures alors un tel mouvement est possible et plus facile à effectuer.
Si les incisives supérieures espacées sont déplacées vers le centre sans être aussi reculées, il est probablement possible de fermer les espaces interdentaires entre ces dents mais il en résultera un espace entre les latérales et les canines. Le fait de les reculer aussi permettra de diminuer ces espaces résiduels, mais pour ce faire, il faut qu’un surplomb horizontal soit présent.
Les proportions dentaires contribuent à l’espacement
- À noter que les descriptions précédentes prennent pour acquis que le dents antérieures aient des dimensions bien proportionnées et normales car si ce n’est pas le cas, il peut y avoir des espaces résiduels, peu importe les mouvements effectués.
- Par « proportions dentaires« , nous référons à la dimension relative des dents les unes par rapport aux autres. Il est normal que les dents n’aient pas toutes la même largeur et grosseur mais, dans une même bouche, elles devraient être proportionnées entre elles pour avoir un sourire plaisant et esthétique.Il n’est pas important qu’une incisive centrale mesure un nombre « X » de millimètres précis en largeur et que la latérale juste à côté en mesure « Y » millimètres (le nombre n’est pas important), mais il est important que la largeur « Y » représente un certain % de la largeur « X » pour avoir des proportions harmonieuses entre les incisives. Pour en savoir plus et voir un exemple de ces proportions.
- Les incisives supérieures sont souvent disproportionnées l’une par rapport à l’autre surtout parce que les incisives latérales sont fréquemment plus étroites que ce qu’elles devraient être (mais il est normal que les latérales soient plus étroites que les incisives centrales à l’arcade supérieure (c’est le contraire pour le bas)). Pour en savoir plus sur les proportions et relation des dents antérieurs supérieures entre elles et comment cela peut affecter l’esthétique du sourire.
Une fois les corrections orthodontiques terminées, s’il persiste des espaces à cause de la dimension étroite de certaines dents, il est possible de combler ces espaces en élargissant les dents fautives à l’aide de matériau composite dentaire ou d’autres moyens prothétiques selon les besoins du cas (facettes dentaires, couronnes). Ces travaux dentaires correctifs sont faits par un dentiste généraliste et n’ont que pour seul but que d’améliorer l’esthétique du sourire car la fonction ne sera pas affectée par la présence d’un ou quelques petits espaces interdentaires. Pour voir des exemples. La présence de latérales supérieures trop étroite est relativement commune (± 2% de la population).
Ouverture de l’occlusion antérieure
Voici un autre exemple illustrant comment les dimensions verticales et horizontales sont inter-reliées dans le déplacement des dents antérieures.
Une dent très inclinée vers l’avant aura toujours tendance à s’allonger ou « descendre » lorsqu’elle sera déplacée vers l’arrière, ce qui augmentera le surplomb vertical (overbite). Par la suite il s’agit de la remonter à son niveau idéal par rapport aux incisives inférieures. Ces deux mouvements peuvent se faire simultanément de sorte que la dent à reculer n’a pas à s’allonger si la mécanique est planifiée adéquatement. Aucun « limage » des dents n’est nécessaire. Ces mouvements verticaux pour dégager les incisives des deux arcades sont ce qu’on appelle « ouvrir l’occlusion« .
L’illustration suivante illustre ce phénomène :
Incisives supérieures avancées et inclinées vers l’avant
Rétraction des dents antérieures et augmentation du surplomb vertical
(A) Dans cet exemple, les incisives supérieures inclinées et avancées (overjet) sont espacées. Elles doivent être rétractées ou reculées pour aider à diminuer l’espacement interdentaire.
(B) À mesure que l’incisive supérieure recule, elle continuera à descendre et commence à recouvrir l’incisive inférieure. (augmentation de l’overbite).
(C) Une fois reculée, l’incisive supérieure recouvre excessivement celle du bas et viendra et est bloquée par cette dernière et ne peut plus reculer.
(D) Pour continuer la rétraction de l’incisive supérieure, il est alors nécessaire de la « remonter » (mouvement d’intrusion ou d’ingression dentaire) pour la dégager celle du bas.
Une mécanique orthodontique adéquate et bien planifiée permettra que ce surplomb vertical excessif n’apparaisse pas pendant la rétraction orthodontique en s’assurant que les mouvements se produisent simultanément dans les trois dimensions. Pour les cas avec un overbite excessif, comme les malocclusions de type classe II division 2, l’utilisation de plans articulés, de cales ou de blocs de disclusion peut être un atout important. Pour voir des exemples de cette mécanique orthodontique.
Voici d’autres exemples de situations diverses où le surplomb vertical influence la possibilité de reculer les dents antérieures. Un tel recul est souvent nécessaire pour fermer des espaces interdentaires entre les dents antérieures supérieures.
Incisives inférieures trop hautes
(A) La situation la plus commune est lorsqu’il y a présence d’une sur-éruption des incisives inférieures. Les incisives supérieures peuvent être normales verticalement comme dans le cas ci-haut ou pas.
(B) Lors de la rétraction (recul) des incisives supérieures, s’il n’y a aucune correction de la position verticale des incisives inférieures elles empêcheront un recul additionnel dès qu’il y aura contact entre ces dents. Une rétention fixe ne pourrait être utilisée derrière les incisives supérieures dans cette situation car les incisives inférieures mordraient constamment dessus et cela causerait un bris ou un décollement de l’appareil (fil de rétention, attelle) et les corrections seraient très instables.
(C et D) Par contre, si les incisives inférieures sont « descendues » (ingression), cela dégagera la voie pour un recul additionnel des incisives supérieures et une rétention fixe pourra aussi être utilisée à la fin des corrections.
Incisives supérieures trop basses
(A) Les incisives supérieures peuvent aussi être trop basses ou « descendues » et recouvrir excessivement celles du bas. Les incisives inférieures peuvent être normales verticalement comme dans le cas ci-haut ou pas.
(B) Lors de la rétraction (recul) des incisives supérieures, s’il n’y a aucune correction de leur position verticale elles ne pourront reculer davantage dès qu’il y aura contact avec les dents opposées. Tout comme pour la situation précédente, il serait très difficile d’utiliser une rétention fixe (fil lingual, attelle de rétention) avec autant de surplomb vertical et la stabilité des corrections serait plus précaire.
(C et D) Par contre, si les incisives inférieures sont « descendues » (ingression), cela dégagera la voie pour un recul additionnel des incisives supérieures et une rétention fixe pourra aussi être utilisée à la fin des corrections.
Incisives supérieures trop basses ET incisives inférieures trop hautes
Cette situation est particulièrement difficile à corriger car elle implique des changements verticaux (hauteur des dents) aux deux mâchoires ou arcades dentaires.
(A) Les incisives de chaque arcades peuvent être fautives et trop se recouvrir verticalement.
(B) Dans une telle situation, la quantité de rétraction ou recul des incisives supérieures est très limitée car la « collision » se produira rapidement. Tout comme pour la situation précédente, il serait très difficile d’utiliser une rétention fixe (fil lingual, attelle de rétention) avec autant de surplomb vertical et la stabilité des corrections serait plus précaire.
(C et D) Si les incisives de chaque arcade sont déplacées verticalement, cela permettra de réduire l’écart horizontal et une rétention fixe pourra aussi être utilisée.
➡ À noter que des illustrations précédentes montrent une situation où l’on tente de reculer les incisives supérieures mais le même principe peut aussi bien s’appliquer à une si l’on tente d’avancer les incisives inférieures. Selon le diagnostic et la nature du problème, les deux approches ou une combinaison des deux peuvent permettre de réduire un surplomb horizontal excessif (overjet).
Et pendant l’orthodontie majeure?
- Le même principe d’ « ouverture de l’occlusion » s’applique lors des traitements d’orthodontie majeurs avec des appareils multi-bagues fixes (« broches »).
- Ouvrir l’occlusion est une étape essentielle pour la plupart des traitements d’orthodontie ayant une malocclusion présentant un surplomb vertical antérieur excessif et cette correction doit être faite dans les premières étapes d’un traitement afin de permettre des corrections dans la dimension sagittale (avant-arrière).
- Que ce soit pour un traitement de compromis ou un traitement complet ou global, si on veut reculer les dents antérieures supérieures; il faut diminuer le surplomb vertical. Un moyen très efficace pour arriver à cette fin est l’utilisation d’un plan articulé (« bite plane ») tel qu’illustré ci-dessous. Pour en savoir plus sur ce concept et ce type d’appareil.
Utilisation d’un plan articulé pour ouvrir l’occlusion pendant un traitement d’orthodontie.
(A) Le plan articulé est un appareil amovible utilisé lorsqu’il y a un surplomb vertical excessif entre les dents antérieures (cercle bleu).
(B) L’ajout d’un plan articulé (rose) permet aux incisives inférieures de mordre sur le plan (*) plutôt que près du palais ou dans la muqueuse du palais. Ceci déplace légèrement la mandibule vers le bas (flèches bleues) et l’arrière (flèche rouge – rotation) en ouvrant la bouche.
(C) Si l’appareil est porté continuellement, après plusieurs mois, les dents postérieures commenceront à migrer vers le haut (éruption) afin de tenter de rétablir un contact avec les dents opposées (flèches). Ce mouvement est aidé par le port d’élastiques.
(D) Après un certain temps, les dents postérieurs se toucheront et, si l’appareil est alors enlevé, on remarquera que les incisives inférieures sont maintenant dégagées de celles du haut mais peuvent être plus reculées à cause du mouvement de recul naturel de la mandibule lorsqu’elle ouvre (comparez la ligne verte entre les incisives). Une fois cette correction verticale effectuée, les dents antérieures supérieures peuvent être reculées et l’overjet diminué.
➡ Pour voir des exemples de malocclusions corrigées de cette façon.
Pourquoi cela ne fonctionne-t-il pas ?
Tout commence par l’ouverture de l’occlusion antérieure…
- Nous avons régulièrement des questions de la part lecteurs du blogue au bas des pages de ce site Web qui nous demandent pourquoi les dents antérieures supérieures ne reculent pas ou pourquoi les espaces interdentaires entre ces dents ne se ferment. Ils décrivent qu’après plusieurs mois de tentative, de port d’élastiques, de ressorts, etc. ils ne voient aucun changement ou progrès. Même sans avoir vu le cas, nous pouvons presque à tout coup conclure qu’il s’agit d’un problème de dimension verticale et d’ouverture d’occlusion antérieure; le praticien tente de reculer des dents antérieures sans avoir « ouvert l’occlusion » antérieure pour éliminer l’overbite excessif. L’équation est « mathématique » et bien sur il peut y avoir d’autres explications au mouvement récalcitrant des dents dans de telles situation mais dans la très grande majorité des cas, la cause est le problème vertical décrit précédemment.
- Lorsque le cas est bien diagnostiqué et que la mécanique orthodontique est adéquate, la fermeture d’espaces interdentaires antérieurs (et même postérieures) peut être rapide comme le montre cet exemple de fermeture de diastème en 5 mois!
➡ Pour en savoir plus sur ce cas.
Stabilité des corrections
- Comme avec tout traitement d’orthodontie, pour obtenir du succès dans la fermeture d’espaces interdentaires, non seulement faut-il un bon diagnostic, une bonne planification et une mécanique permettant d’atteindre les objectifs de traitement visés mais il faut avoir un protocole de rétention ou contention orthodontique qui assurera la meilleure stabilité possible pour les corrections obtenues.
- Dans le cas de fermeture de diastèmes et espaces interdentaires, ceci requiert idéalement le port d’une contention fixe sous forme d’attelle ou de fils collés sur la surface interne (côté de la langue) et ce à très long terme (plusieurs années…).
- Des appareils amovibles peuvent avoir une certaine efficacité mais l’expérience nous a montré que les patients portent rarement de tels appareils plus de 2-3 ans et parfois beaucoup moins.
- La rétention est particulièrement importante si les corrections orthodontiques ont été faites dans le cadre d’un traitement de compromis n’ayant eu comme but que de fermer des diastèmes supérieurs. Dans de tels cas, il est possible qu’il reste un overbite important et qu’il soit plus difficile, voire impossible, d’adapter correctement un fil lingual de rétention sans que les incisives inférieures ne mordent sur ce fil. Le fil de rétention est alors beaucoup plus susceptible aux bris et décollement et s’il est impossible d’en porter un, une rétention amovible sera la seule alternative.
- C’est pourquoi il n’est parfois pas possible d’envisager un traitement de compromis pour faire des corrections limitées seulement à la fermeture des espaces interdentaires antérieurs. En fait, les espaces peuvent probablement être fermés et maintenus ainsi tant que les appareils orthodontiques correcteurs sont en bouche mais dès qu’ils seront enlevés les dents se déplaceront vers leur point de départ (récidive)… alors à quoi bon tenter ces corrections. Des corrections globales permettant d’ouvrir l’occlusion tel que décrit dans cette page permettraient de solutionner ce dilemme; corrections limitées qui ne tiendront pas la route ou des corrections complétés qui assureront un meilleur résultat (fonction et esthétique) à plus long terme.
- À noter que, peu importe le traitement d’orthodontie effectué et le protocole de rétention utilisé, rien ne peut « garantir » une stabilité absolue et « à vie » des corrections obtenues. Pour en savoir plus sur la rétention orthodontique et la stabilité des corrections.
Lecture additionnelle sur des sujets complémentaires :
➡ Pour connaître les causes (étiologie) des espaces interdentaires et diastème et voir des cas traités.
➡ Pour voir des exemples de fermeture de diastèmes.
➡ Pour en savoir plus sur le déplacement des dents
➡ Pour voir des cas où les dents ont été « remontées » voir les cas traités classe 2.
➡ et pour voir des exemples ou les dents sont déplacées verticalement pour les mettre au même niveau gingival et améliorer l’esthétique.
➡ Dernière mise-à-jour : 2017-07-17 @ 18:01:42 © Jules E. Lemay, www.ortholemay.com – Tous droits réservés / All rights reserved Publié le : Mar 9, 2016 @ 08:49 |